À retenir
Seuls les statuts ou une décision collective des associés peuvent fixer la rémunération du gérant d’une SARL.
Ce formalisme s’impose, y compris dans le cas où le gérant est, avec son conjoint, le seul associé de la société.
Cassation commerciale, 25 septembre 2012, n° 11-22754 et
Cassation commerciale, 25 septembre 2012, n° 11-22337
1) Développements
La loi ne précise pas les conditions de fixation de la rémunération du gérant de société à responsabilité limitée (SARL). Elle prévoit seulement qu’il est nommé par les statuts ou par une décision collective des associés.
S’appuyant sur cette disposition, la Cour de cassation vient de poser clairement le principe selon lequel la rémunération du gérant d’une SARL est déterminée soit par les statuts, soit par une décision collective des associés. Ainsi, pour elle, il est logique que la fixation de la rémunération soit soumise au même schéma décisionnel que sa nomination.
Et la Cour de cassation en déduit que le gérant d’une SARL ne peut pas s’octroyer une rémunération au motif qu’il est le seul associé de la société avec son conjoint. Une décision collective des associés doit être prise et portée sur le registre des assemblées.
Illustration : des époux détenaient la totalité des parts sociales d’une SARL, le mari assurant la gérance. Fin 2007, les époux avaient cédé tous leurs titres à une tierce personne. Mais avant la cession, l’époux gérant avait prélevé sur les comptes de la société une somme au titre de sa rémunération pour l’exercice 2007. Après la cession, l’acquéreur des titres avait assigné les époux en remboursement de cette rémunération prélevée sans l’autorisation de l’assemblée des associés. Une action qui avait échoué en appel. En effet, considérant que les époux étaient les seuls associés de la société au moment du prélèvement de la rémunération litigieuse, la cour d’appel avait jugé qu’il n’y avait pas lieu de rechercher si ce prélèvement avait ou non été autorisé par les associés. La Cour de cassation a rejeté cette solution pragmatique : quelle que soit la composition du capital, la fixation de la rémunération du gérant doit obéir aux mêmes principes.
Les entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL) n’échappent pas à la rigueur de la Cour de cassation, qui a eu également l’occassion de préciser que la rémunération du gérant d’une EURL, même lorsque celui-ci est associé unique, doit être fixée soit par les statuts, soit par une décision de l’associé unique.
Attention : le non-respect du formalisme attaché à la fixation de la rémunération peut donc être lourd de conséquences. Si les titres de la société changent de mains, ces dirigeants s’exposent à une annulation des rémunérations versées et à l’obligation de les rembourser.
2) Pour aller plus loin
Modes de fixation de la rémunération
La fixation de la rémunération du gérant par une décision collective des associés est assurément plus confortable qu’une fixation par les statuts. En effet, par nature, la rémunération du gérant est soumise à des évolutions.
Or, si elle est fixée par les statuts, toute évolution de la rémunération est en principe assujettie au régime des modifications statutaires (obligation de prendre une décision extraordinaire de l’assemblée des associés et d’accomplir les formalités requises).
Alors que si elle est fixée par simple décision des associés, la rémunération du gérant relève de la catégorie des décisions ordinaires. Une décision qui ne constitue pas, en outre, une convention réglementée et n’a donc pas, contrairement à d’autres conventions passées entre la société et son gérant, à faire l’objet d’un rapport spécial puis à être soumise à l’approbation de l’assemblée des associés. Et par conséquent, le gérant associé peut participer au vote fixant sa rémunération.
Attention : cette faculté peut être source d’abus. La fixation par le gérant majoritaire d’une rémunération excessive au regard de la situation de la société peut être sanctionnée pour abus de majorité, mais également sur le plan fiscal, en tant qu’acte anormal de gestion, ou encore sur le plan pénal, en tant qu’abus de biens sociaux. C’est donc avec mesure et toujours en cohérence avec la situation de la société que le gérant majoritaire doit voter sa rémunération.
Formes de la rémunération
Les statuts ou la collectivité des associés déterminent librement la forme de la rémunération du gérant. Il peut s’agir d’une rémunération fixe ou d’une rémunération variable (un pourcentage du chiffre d’affaires de la société par exemple) ou encore d’une rémunération constituée d’une part fixe et d’une part variable.
Cette rémunération peut être complétée par l’octroi de primes exceptionnelles (prime de bilan) ou encore d’avantages en nature (véhicule, logement…).
Quelle que soit la forme que prend la rémunération du gérant, on rappelle que sur le plan social, le gérant rémunéré est assujetti au régime général de la Sécurité sociale s’il est associé minoritaire, ou au régime social des travailleurs indépendants s’il est majoritaire ou s’il appartient à un collège de gérance majoritaire.
Précision : pour évaluer la participation du gérant dans le capital social, sont prises en compte les parts détenues en pleine propriété ou en usufruit par le gérant, son conjoint ou son partenaire pacsé, et ses enfants mineurs non émancipés, ainsi que les parts détenues par une société associée dans la SARL dont le gérant a le contrôle.